Deux mesures pour soutenir les charges locatives : 

Pour soutenir les locataires et inciter les propriétaires bailleurs à renoncer à percevoir les loyers qui leur sont dus durant la crise économique liée au covid-19, le législateur a introduit deux mesures :

-la faculté, pour les bailleurs, de déduire de leurs résultats imposables les abandons de loyers qu’ils consentent, entre le 15 avril et le 30 juin 2021, à une entreprise locataire avec laquelle ils n’ont aucun lien de dépendance (voir § 4-4) ;

-les bailleurs peuvent bénéficier, sous certaines conditions, d’un crédit d’impôt allant jusqu’à 50 % des loyers abandonnés au titre du mois de novembre 2020, cet abandon devant être réalisé au plus tard le 31 décembre 2021 (loi art. 20, I à V) (voir §§ 5-2 à 5-6).

Bailleurs et locaux éligibles au crédit d’impôt

Le crédit d’impôt s’applique aux bailleurs, personnes physiques ou morales, à raison des abandons ou renonciations définitifs des loyers hors taxes et hors accessoires, échus au titre du mois de novembre 2020, lorsqu’ils sont afférents à des locaux situés en France et consentis au plus tard le 31 décembre 2021 (loi art. 20, I.1).

Peuvent également y avoir droit les bailleurs bénéficiant d’un régime d’exonération des bénéfices (CGI art. 44 sexies, 44 sexies A, 44 septies, 44 octies, 44 octies A, 44 duodecies, 44 terdecies à 44 septdecies et 207 à 208 septies) ainsi que les bailleurs sociaux publics (offices publics de l’habitat).

À NOTER
Le crédit d’impôt ne peut pas bénéficier aux entreprises qui, au 31 décembre 2019, étaient en difficulté au regard de la réglementation européenne (règlt (UE) 651-2014 du 17 juin 2014) (loi art. 20, V).

Pour bénéficier du crédit d’impôt, les bailleurs personnes physiques doivent être domiciliés en France.

Critères à remplir par l’entreprise locataire

Pour bénéficier d’abandons de loyers, les entreprises locataires doivent satisfaire aux critères suivants (loi art. 20, I.1.1° à 4°) :

-louer des locaux faisant l’objet d’une interdiction d’accueil au public au cours de la période visée au paragraphe 5-2 ou exercer leur activité dans certains secteurs particulièrement touchées par l’épidémie de covid-19 tels que l’hôtellerie, les cafés, la restauration ou la culture et l’événementiel (secteurs définis en annexe 1 au décret 2020-371 du 30 mars 2020) ;

-avoir un effectif inférieur à 5 000 salariés ; cette condition ne s’applique cependant pas aux entreprises locataires constituées sous forme d’association, mais celles-ci doivent en revanche, pour ouvrir droit au crédit d’impôt, être assujetties aux impôts commerciaux ou employer au moins un salarié ;

-ne pas être en difficulté au 31 décembre 2019 au sens du règlement général d’exemption par catégorie (RGEC) du 17 juin 2014. Néanmoins, les micro et petites entreprises au sens du droit européen (voir § 5-23) qui sont en difficulté au 31 décembre 2019 se situent dans le champ des entreprises locataires éligibles aux abandons de loyers, à condition de ne pas faire l’objet d’une procédure collective d’insolvabilité et de n’avoir pas bénéficié d’une aide au sauvetage ou d’une aide à la restructuration ;

-ne pas être en liquidation judiciaire à la date du 1er mars 2020 ;

-ne pas présenter de liens familiaux ou de liens de dépendance, au sens l’article 39, 12 du CGI, avec le bailleur, sauf si ce dernier est en mesure de justifier par tous moyens des difficultés de trésorerie de l’entreprise locataire.


Appréciation de la condition d’effectif :  Il est tenu compte de l’ensemble des salariés des entités liées lorsque l’entreprise locataire contrôle ou est contrôlée par une autre personne morale au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce.

Calcul et utilisation du crédit d’impôt
Crédit d’impôt allant jusqu’à 50 % des loyers abandonnés

Le crédit d’impôt s’élève à 50 % des loyers abandonnés. Néanmoins, lorsque l’entreprise locataire a un effectif d’au moins 250 salariés, l’assiette du crédit d’impôt est plafonnée à hauteur des deux tiers du montant du loyer prévu au bail, échu ou à échoir au titre du mois concerné. Dans cette situation, le crédit d’impôt est donc égal à un tiers des loyers abandonnés.

EXEMPLE
Si une société bailleresse renonce à percevoir un loyer de 30 000 € d’un locataire employant au moins 250 salariés et satisfaisant aux conditions visées au paragraphe 5-3, l’assiette du crédit d’impôt s’établit à : 30 000 € × 2/3 = 20 000 € .

Le crédit d’impôt s’élève alors à : 20 000 € × 50 % = 10 000 € (ou 30 000 × 1/3 % = 10 000 €).

Le montant total des abandons ou renonciations de loyers donnant lieu à crédit d’impôt dont bénéficie chaque entreprise locataire ne peut excéder un plafond de 800 000 € (plafond défini au 3.1 de la communication de la Commission européenne du 19 mars 2020 relative à l’encadrement temporaire des mesures d’aides d’État visant à soutenir l’économie dans le contexte actuel de la flambée de covid-19).

Utilisation du crédit d’impôt

Le crédit d’impôt s’impute (loi art. 20, III.1) :

-pour les entreprises relevant de l’IR, sur l’impôt dû au titre de l’année civile au cours de laquelle les abandons ou renonciations définitifs de loyers ont été consentis, y compris en cas de clôture d’exercice en cours d’année civile

-pour les entreprises redevables de l’IS, sur l’impôt dû au titre de l’exercice au cours duquel les abandons ou renonciations définitifs de loyers ont été consentis.

EXEMPLE
Une entreprise accorde à ses locataires un abandon définitif des loyers de novembre et leur notifie cette information en décembre.

Si le bailleur est une société soumise à l’IS :
-clôturant ses comptes le 31 décembre, le crédit d’impôt sera imputé sur l’IS dû au titre de l’exercice clos le 31 décembre 2020, sur le bordereau de liquidation déposé le 15 mai 2021 au plus tard ;

-clôturant ses comptes le 30 novembre, le crédit d’impôt sera imputé sur l’IS dû au titre de l’exercice clos le 30 novembre 2021, sur le bordereau de liquidation déposé le 15 mars 2022 au plus tard.

Si le bailleur est une entreprise relevant de l’IR, clôturant ses comptes le 31 mars, le crédit d’impôt sera imputé sur l’IR dû en 2021 au titre de 2020 (2020 est l’année civile au titre de laquelle l’abandon a été consenti) et non sur l’IR dû en 2022, qui sera calculé sur le résultat de l’exercice clos le 31 mars 2021.

Si le montant du crédit d’impôt excède l’impôt dû au titre de cette année ou de cet exercice, l’excédent est restitué.

La créance correspondant au crédit d’impôt non utilisé est inaliénable et incessible, sauf dans le cadre d’une cession Dailly.

REMARQUE

Intégration fiscale. En présence d’un groupe intégré, la société mère est substituée aux sociétés du groupe pour l’imputation sur le montant de l’IS dont elle est redevable au titre de chaque exercice des crédits d’impôt dégagés par chaque société du groupe.

Pour les sociétés de personnes relevant de l’IR (CGI art. 8 à 8 ter), les sociétés créées de fait (CGI art. 238 bis L), les sociétés civiles de placement immobilier (CGI art. 239 septies), les groupements d’intérêt économique (CGI art. 239 quater), les groupements d’intérêt public (CGI art. 239 quater B), les groupements européens d’intérêt économique (CGI art. 239 quater C) ainsi que les placements collectifs (c. mon. et fin. art. L. 214-1), le crédit d’impôt peut être utilisé par leurs associés ou par les porteurs de parts ou actionnaires proportionnellement à leurs droits dans ces sociétés, groupements ou fonds.

Obligations déclaratives

Pour bénéficier du crédit d’impôt, les bailleurs doivent déposer une déclaration conforme à un modèle établi par l’administration dans les mêmes délais que la déclaration annuelle de revenu ou de résultat (loi art. 20, IV).

Dans le cadre du régime de l’intégration fiscale, la société mère déclare les crédits d’impôt pour le compte des sociétés du groupe, y compris ceux qui la concernent, lors du dépôt de la déclaration relative au résultat d’ensemble du groupe.

 

Loi 2020-1721 du 29 décembre 2020, JO du 30, texte 1 ; C. constit., décision 2020-813 DC du 28 décembre 2020, JO du 30, texte 2